Nous étions une vingtaine de journalistes de l’AJP à avoir le privilège d’être accueillis à l’Académie des Sciences, ce mercredi 9 décembre. Pour ceux qui ont raté l’occasion, voici un petit compte-rendu et les contacts et liens pour en savoir plus.
Au mois d’octobre 2015, ont été inscrites au Registre de la Mémoire du Monde de l’Unesco, l’ensemble des archives de Louis Pasteur, conservées pour 90% à la Bibliothèque nationale de France mais aussi à l’Académie des sciences, dont il fut secrétaire perpétuel et où eurent lieu, entre 1860 et 1865, des débats épiques sur l’existence ou non, de « la génération spontanée » à l’origine de la vie.
Cet événement, passé relativement inaperçu des médias qui pourtant évoquent abondamment la moindre candidature à l’inscription d’un monument sur la liste Unesco du Patrimoine mondial, nous a semblé mériter d’être « creusé » pour nourrir l’information donnée à nos membres. D’autant plus qu’il va servir de tremplin aux commémorations des 350 ans de la création de l’Académie des sciences. C’est pourquoi nous avons organisé cette rencontre avec deux des responsables de classement, Eric Postaire, chargé de mission à l’Académie des sciences et qui a suivi ce dossier et Gérard Grunberg, président du Comité français du Registre Mémoire du Monde. Ce dernier a bien voulu nous expliquer en détails en quoi consistait ce classement du patrimoine documentaire, créé en 1992 et auquel la France a adhéré en 2002.
De gauche à droite : Eric POSTAIRE, Sophie LAURANT, Gérard GRUNBERG
Pour l’instant, 60 Etats sur 196, ont un comité et 400 documents « ayant une valeur unique et irremplaçable pour l’humanité » a-t-il expliqué, sont classés à ce registre. La France en compte huit, dont la Déclaration des Droits de l’Homme et du citoyen, l’Appel du 18 juin et la Tapisserie de Bayeux. « Mais en octobre, nous avons eu l’honneur d’obtenir trois nouveaux classements, ajoute Gérald Grunberg : la Mappa Mundi, la plus ancienne carte représentant le monde connu, datant du VIIe siècle et conservée dans un manuscrit médiéval à Albi ; les pantomimes lumineuses d’Emile Reynaud, ancêtres des dessins animés (1892-1898) et enfin les archives de Louis Pasteur. »
Pasteur « évangélisateur de la science »
« C’est la première fois qu’un fonds d’archives qui témoignent de toute une démarche scientifique est ainsi déclaré patrimoine de l’humanité, renchérit Eric Postaire. En effet, les lettres, les carnets de laboratoire, les divers comptes rendus de séances de l’Académie permettent de retracer la pensée pastorienne en évolution : comment ce chimiste a voulu résoudre les problèmes bien concrets de son temps : pourquoi le vin tourne-t-il à l’acide ? Pourquoi les poules attrapent-elles le charbon ? Quelle est la cause du décès des vers à soie ? « Et c’est ainsi qu’en éliminant méthodiquement les mauvaises raisons, il resserre les hypothèses, explique Éric Postaire, puis cherche les solutions.
En chimiste, il applique son raisonnement analytique à des questions qui vont s’avérer relever de la biologie, cette science du vivant naissante à laquelle Pasteur va finalement attacher son nom en découvrant la vie microbienne et les vaccins. »
Pasteur est l’un des très rares Français connu dans le monde entier, et notamment parce qu’il a su être un « évangélisateur de la science » selon l’expression d’Éric Postaire, en envoyant ses disciples fonder des instituts dans le monde, partout où les maladies infectieuses sévissaient, mais aussi parce qu’il était un entrepreneur avisé. « Mais nous ne voulons pas que sa mémoire soit uniquement testimoniale, ajoute le chargé de mission. Ce classement est là pour raviver et transmettre ce raisonnement logique et cet esprit expérimental sans lequel il n’y aurait pas de science moderne. »
« Le seul autre fonds scientifique classé au registre de la Mémoire est d’une autre nature, précise Gérald Grunberg : il concerne les archives qui racontent la découverte de l’insuline en 1921 à Toronto (Canada). Mais elles documentent l’histoire d’une découverte et non l’ensemble de la vie, de la pensée et de l’œuvre d’un savant. »
Des documents « authentiques et irremplaçables »
Les critères de classement à l’Unesco sont stricts mais variés selon la nature de l’archive : documents authentiques et irremplaçables, influence sur l’époque, importance de l’auteur, du style, etc. « Les deux objectifs du classement sont d’assurer leur préservation, naturellement, ajoute le président du comité français, mais aussi de les rendre accessibles au plus grand nombre. Aujourd’hui, grâce aux techniques numériques, c’est beaucoup plus simple, mais il faut tenir compte de l’équipement de chaque pays. »
En ce qui concerne le fonds Pasteur, l’Académie s’y emploie avec la promotion de la maison-laboratoire de Pasteur, à Arbois dans le Jura, qui devrait devenir un véritable centre d’interprétation. Le lancement de cette opération aura lieu le 16 février à Arbois et signera le début des différentes opérations du 350 e anniversaire de l’Académie des Sciences, dont le patrimoine documentaire, mais aussi les maisons de savants sont à redécouvrir.
Sophie Laurant
Voir la vidéo de l’interview d’Eric POSTAIRE ci-dessous :
LES ARCHIVES DE LOUIS PASTEUR INSCRITES AU… par AJPAT
Contacts et liens utiles :
Gérald Grunberg (Comité français du Registre de la Mémoire de l’Unesco) : [gerald.grunberg@orange.fr->]
Eric Postaire (chargé de mission à l’Académie, entre autres sur les manifestations Louis Pasteur) : [eric.postaire@academie-sciences.fr->]
Marie laure Moinet (Attachée de presse Académie des Sciences )
[marie-laure.moinet@academie-sciences.fr
->]
Guillaume Fau (conservateur du fonds Pasteur à la BNF) : [guillaume. fau@bnf.fr->]
Le Registre de la Mémoire de l’Unesco ;
Maison de Louis Pasteur :
http://www.academie-sciences.fr/archivage_site/pasteur.htm
Académie des Sciences :
http://www.academie-sciences.fr/fr/Programmes-specifiques/pour-un-universalisme-scientifique.html
Le programme des 350 ans de l’Académie des sciences :